Attirance ou répulsion ?
A l’instar des voeux et des souhaits qui fleurissent le quotidien à l’approche des fêtes de Noël, Valérie Vaubourg récupère et retranscrit le « Happy New Year » en « Happy New War« . Dans le raffinement des ambages typographiques, l’artiste nous souhaite une joyeuse nouvelle… guerre.
Habituée au détournement d’images, Valérie Vaubourg questionne le sens précis des images et des mots, agissant comme un révélateur. Ainsi, grâce à ce nouveau détournement, elle nous confronte au fait que l’envahissement par les messages les font disparaître.
Au-delà du jeu de mots, au-delà des résonances phonétiques, l’artiste soulève également la question du langage guerrier tellement présent dans le vocabulaire courant : la lutte (sociale), la guerre (des monnaies), le combat (politique)… Non, sans ironie, cet oxymore (figure de style réunissant deux termes opposés, de sens contraire), Happy New War, renvoie le spectateur à ses propres contradictions.
Ici la violence est décorative. Valérie Vaubourg travaille non pas tant les images elles-mêmes que la manière dont elles sont perçues. L’artiste aide à constater que si les images parlent bel et bien, elles ne tiennent pas nécessairement le discours que l’on attend d’elles. Son travail dirige le spectateur vers une dimension politique et sociale qui, a priori, nous échappait.
Valérie Vaubourg cherche à renouer le dialogue entre l’observateur, la représentation et sa signification.
Lorsqu’une chose n’est pas évidente au premier abord, on a coutume de dire qu’elle ne saute pas aux yeux. Cette locution familière s’adapte au travail de Valérie Vaubourg et c’est ce que l’ont pu découvrir les élèves du collège Boris Vian de Coudekerque-Branche lors de l’exposition eroa « Manifestons nous » (mars-avril 2018).
On croit d’abord ne voir que des images, des images que tout le monde connaît, que tout le monde a déjà vues des dizaines de fois et qui font sens. La stratégie de Valérie Vaubourg repose précisément sur ce premier abord, sur cette manière qu’a l’observateur contemporain de ne plus voir ce qui se montre à lui, de ne plus même être tenté de regarder, persuadé qu’il est de déjà savoir de quoi il s’agit ou, pour le moins, de l’avoir déjà vu.
Puis un infime détail entraperçu attire en effet l’attention du spectateur. Le dispositif mis en place a en effet toujours pour vocation de cacher tout en révélant le motif. De jolis matériaux, de la blancheur, de la pureté, un beau métier, de la belle ouvrage, mais ce qui est donné à voir déstabilise notre impression sensuelle. Les matériaux se transforment en pièges qui nous électrisent. Lorsque le spectateur prend conscience du dispositif, on a l’impression que celui-ci se prend une décharge sensorielle.
Dans La vie en rose, par exemple, on aperçoit de loin un papier peint, imitant les toiles de Jouy à la mode des salons du XVIIIe siècle, fixant dans notre inconscient des motifs bien connus de saynètes bucoliques imprimées. Ce papier peint nous parle d’univers intime, privé, décoratif, appartenant à notre patrimoine commun, ce que l’on pourrait qualifier de « bel ouvrage ».
De près, l’ouvrage est un leurre, un piège, révélant un motif brutal : de scènes de violences policières. Images issues de violences relayées par les médias. Le motif médiatique se fond alors dans le décor.