Jean-Louis Accettone – Lycée Pierre Forest – MAUBEUGE – septembre 2017

 Présentation de Jean-Louis Accettone et du projet « ABC »

Samedi 16 septembre.

Au cours de cette première rencontre, Jean-Louis Accettone a montré aux élèves des éléments de son travail, monobandes, catalogues, reproductions d’installations vidéo, et leur a exposé sa démarche ainsi que les enjeux qui la sous-tendent.

Jean-Louis Accettone a ensuite présenté le projet aux élèves, projet dont l’intention est de proposer à ces derniers d’expérimenter artistiquement et techniquement un projet plastique, de l’approche à la réalisation finale, jusque sa présentation au public. La forme finale sera un film expérimental.

Il s’agira de développer une relation entre les mots, leurs sens, et la représentation visuelle qui en sera donnée simultanément, interprétée par des personnages jouant avec le motif de leur silhouette, de leur visage, des mains et d’objets. Avec un vocabulaire de signes limités, des séquences riches en significations et en expressions seront alors réalisées. À partir d’un mot et de son interprétation directe, les motifs des silhouettes associés à certaines parties du visage éclairées, constitueront la globalité d’un vidéogramme sonore. A l’origine, un inventaire de mots comme un abécédaire. Aux mots sont associées des images, les motifs contrastés des ombres, silhouettes d’objets et des visages. Ces images sont posées sur les mots selon des figures rhétoriques de redondances, de glissement de sens, de contradiction, etc. La mise en relation mot/motif/ associée aux mouvements de caméra et au rythme des plans, créé des « chocs » de sens et de sensations.

La finalité de cette construction est la création d’un univers poétique, polysémique et jubilatoire, dans lequel le sens rebondit d’un motif à l’autre.

Sous la forme apparente de l’apprentissage de la lecture, mot par mot en ordre alphabétique, se construit une suite sonore et visuelle, partition esthétique.

Samedi 30 septembre.

 Après une présentation du dispositif de tournage, Jean-Louis Accettone propose à chaque groupe de présenter le fruit de son travail de réflexion. Suivant le principe du projet ABC et la problématique de lecture signe/sens/motif sonore/motif visuel, chaque groupe énonce son abécédaire : Amour, Bisou, Couple / Avion, Bagage, Crash / Allaitement, Berceuse, Couche / Alcool, Bouteille, Crash / Agrandir, Bâtir, Civilisation ; etc. Afin de décliner chacun de ces trios sémantiques, les élèves sont invités à constituer un stock de mots autour de la thématique choisie, à chercher des visuels et surtout, à penser en images et en sons. Comment représenter un concept ? Quelles silhouettes peuvent véhiculer l’idée de civilisation, ou incarner le verbe agrandir ? Pour proposer quelques pistes de réflexion, Jean-Louis Accettone est venu avec sa boîte à outils : deux poules qui picorent à la faveur d’une simple préemption, ours et chasseur manipulés à l’aide de baguettes munies d’adhésif, oiseau fait en origami… Car derrière la mise en image se profile la question du style et de l’intention qu’il recèle…

Samedi 07 octobre.

Après un rapide rappel de l’échelle des plans, les élèves sont passés à l’écriture de leurs séquences. Chaque séquence sera constituée de trois plans, chaque plan correspondant à un mot en A, puis B, et enfin C. Ce travail d’écriture est l’occasion pour les élèves d’avoir une première approche du découpage technique et d’en découvrir l’exigence. A quelle distance du sujet nous situons-nous ? Que voit-on ? Qu’entend-on ? Et pourquoi.

La phase d’écriture terminée, les élèves ont listé au tableau les objets dont ils avaient besoin, certains ont commencé à en bricoler. Un « troc » de bons procédés, « échange coup de main contre coup de pouce », s’est alors organisé, occasion de mettre à l’épreuve la capacité de chacun à donner et recevoir, à s’inscrire dans un projet collaboratif. Aussi la matinée s’est-elle achevée dans l’enthousiasme général, chacun proposant d’amener les objets manquants dans les différents projets…

Samedi 14 octobre.

La phase de tournage débute mais en commençant par les sons. Une démarche originale car nos jeunes générations ne sont pas forcément sensibles à l’univers sonore des productions filmiques. Ynès prête sa voix pour égrener les différents « ABC ». Auparavant le rythme, la tonalité de sa voix est choisi avec chaque groupe de travail. Les élèves restent maîtres de leur travail et comprennent qu’ils impriment leur marque.

Jean-Louis Accettone explique avec simplicité les réglages de base de l’enregistreur et surtout les fonctionnalités du microphone « LEM », microphone statique spécialement étudié pour la restitution des voix. Le silence se fait dans le studio, Ynès pose sa voix, ses camarades s’occupent des prises : l’un à l’enregistreur pour déclencher et arrêter l’enregistrement, un autre au casque pour contrôler la modulation.

La séance devient un moment de suspension entre silence, éclats de voix ou simples mots. Chaque élève est acteur et surtout parvient à toucher du doigt un procédé cinématographique le plus souvent insaisissable, impalpable. Loin du « papier-peint musical » offert dans de nombreux films et séries, les élèves sentent tout le potentiel qui peut se dégager du son et voient combien il est un élément fondamental de mise en scène.

Samedi 21  octobre.

« Moteur … ça tourne … action » : 3 mots pour être au cœur de cette séance : le tournage. Chaque groupe passe un à un pour réaliser leurs prises de vues sous la houlette de Jean-Louis Accettone. Notre intervenant explique simplement les réglages de la caméra professionnelle (diaphragme, gain, vitesse) mais aussi la manipulation du pied avec ses nombreuses frictions. Ces séances de tournage se font avec solennité mais surtout envie. Les élèves devant et surtout derrière la caméra éprouvent en effet un plaisir non dissimulé à tourner. Ils voient sur un écran le fruit de leur travail, leurs idées, leurs histoires posées sur une feuille de papier prendre vie.

Pendant qu’un groupe tourne, les autres élèves ont eux aussi des taches à accomplir : enregistrer – cette fois-ci en total autonomie – les bruitages, préparer les accessoires, répéter les saynètes, rédiger une note d’intention. CDI, studio, salle de classe sont occupés et le travail se fait avec sérieux. Enfin, des élèves montent sur le logiciel « Final Cut pro » les voix enregistrées la séance d’avant. Jean-Louis Accettone a préalablement expliqué les fonctions de base du logiciel à Clémence et Lucas. Ces derniers débutent, ils réagencent l’ordre du montage. Ils viennent ensuite expliquer aux autres cet environnement numérique spécifique et assez peu connu ; la transmission des manipulations de base se fait par pairs. Cette manière de travailler reflète l’enjeux de cette séance : travailler en groupe, communiquer, faire circuler les informations, acquérir de l’autonomie. Si le tournage est mal préparé, les autres groupes en pâtissent ; si les bruitages sont mal enregistrés, le montage ne se fera pas. Solidarité, cohérence mais surtout responsabilité sont les maîtres-mots de cette matinée.