Vendredi 12 mars, au CDI, les élèves du workshop de l’eroa et toute leur classe de 3e2 assistaient avec le photographe François Van Heems au CDI à un mini-concert bien singulier. Entourés de leurs professeurs d’éducation musicale, d’histoire, d’arts plastiques, de leur documentaliste, du chef d’établissement, de son adjoint et de leur CPE, ils ont pu rencontrer François Eberlé, le chanteur-musicien qui leur a permis de joindre au film souvenir de leur expérience photographique sa chanson intitulée « les monuments aux morts ».
Alors que les élèves voulaient remercier François Eberlé et le questionner sur cette chanson qui semblait presque « cousue main » pour leur projet, c’est lui qui leur a dit merci pour ce choix, très ému qu’il était de pouvoir à sa manière « servir » un si beau projet et accompagner cette volonté de s’interroger sur le passé, sur cet édifice mémoriel que constitue le monument au mort.
L’occasion pour lui de rappeler le caractère pacifiste de sa démarche : François Eberlé déplore le fait que les monuments aux morts soient encore souvent perçus comme un moyen de célébrer la victoire contre l’ennemi plutôt qu’un élément pour ne jamais oublier que la guerre est meurtrière et qu’il faut vivre en connaissance du passé pour construire un présent et un avenir moins violents.
C’est avec émotion qu’il nous a présenté les sources de son spectacle intitulé génération 14 : l’un des carnets de son grand-père dont l’écriture serrée témoigne quotidiennement de l’horreur vécue dans les tranchées, avant de nous interpréter avec non moins d’émotion cet air que nous avons choisi et qui depuis quelques semaines nous trotte dans la tête : « Non de non ils sont plus d’un millions, plus d’un millions de noms en lettre d’or ».
Cette chanson, il l’a dédie bien sur à son grand-père, mais aussi au monument aux morts de Saint Martin d’Estréaux, célèbre pour ses inscriptions pacifistes uniques en France. Réquisitoire contre la guerre, il contraste avec les monuments glorifiant les soldats morts pour la patrie.
Sujet de polémique, le monument pacifiste de Saint-Martin d’Estreaux n’a été inauguré que 25 ans après son édification et a été l’objet d’actes de vandalisme dans les années trente.
« Maudite soit la guerre » est une des inscriptions que l’on peut y lire, ces mots sont repris avec force par François Eberlé pour conclure sa ritournelle.
D’autres chansons sont venues ponctuées cette rencontre, comme « le petit Lavisse » un autre hymne au pacifisme. « Moi et mon grand-père on n’aime pas la guerre » répète-t-il dans le refrain tout en s’exprimant sur « le petit Lavisse » cet ouvrage écrit par Ernest Lavisse, un historien français qui aura enseigné l’histoire à des générations d’écoliers jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Conçu, comme l’Histoire de France, en réaction à la défaite de 1870, ce manuel ; dans lequel sont célébrés les hauts faits de la nation et édulcorés les autres ; devait par le récit de son histoire, cultiver chez l’écolier d’alors l’amour de la France devenue République. Mais ce récit avait une finalité : édifier les consciences des futurs citoyens et surtout des futurs soldats.
Souhaitons que cette rencontre et tout ce riche travail interdisciplinaire de nos élèves et de leurs professeurs dans cet EPI intitulé « Pourquoi et comment lutter contre l’oubli ? » , cultive chez ces jeunes le devoir de mémoire, dans sa dimension pacifiste plutôt que dans la haine de l’autre.
Gaétane Lheureux, professeur d’arts plastiques