En octobre 2004, commande d’Olivier Michel aux élèves de 4ème ( un maximum de productions variées autour de sa démarche : j’use mon bic) . Novembre 2004,
appropriation et variations autour de la commande, premières réactions : « Ce n’est pas de l’art ! » « C’est du gribouillage ! » « C’est ennuyeux » « ça ne sert à rien ».
Philippe Parreno : la pierre qui parle. Lors de la visite de l’exposition, les élèves font un « croquis » de l’œuvre en usant leur bic et interprètent ses paroles dans une bulle en commençant par « J’use mon bic sur la pierre qui parle comme …»(la suite de la phrase étant créée à partir de trois mots prélevés dans le flot de paroles émis par la pierre. Le résultat, en parfait décalage par rapport à un discours habituel, est en accord avec l’incompréhension ressentie par les élèves face à la majeure partie des paroles issues de la pierre. Tout à coup on se rend compte que ces phrases « décalées » nous ouvrent à une dimension nouvelle. De plus l’apparente absurdité de cette écriture est en parfaite symbiose avec l’objet (pierre qui parle), avec la « technique » utilisée pour le représenter (j’use mon bic), et de ce fait avec la démarche d’Olivier Michel.
Décembre 2004
Envoi d’un colis de production à Olivier Michel. Par contact téléphonique, l’artiste nous fait part de sa déroute face à ces productions hétéroclites qui l’intriguent et le motivent. Après quelques échanges sur le pourquoi de certaines productions, il se met au travail.
Mars 2005
Installation des œuvres de l’artiste à l’Espace 36 de Saint-Omer, vernissage et rencontre avec les élèves qui découvrent avec stupéfaction leur nom sur les cartels, à côté de celui de l’artiste :
Olivier Michel a prélevé des fragments de certaines productions (1cm2) les a agrandi par séries, a de nouveau usé son bic avec son geste en boucle ré-appliqué sur le trait plus large issu de agrandissement des boucles des élèves (mise en abîme !)
Il a copié l’un des croquis où l’élève a usé son bic sur la pierre qui parle, par rétro projection, sur le mur de la galerie à la mine de plomb. La forme fait penser à un cerveau, d’où le titre (dû aussi à la technique) : matière grise.
Il a repris un autre croquis qu’il a mis en volume en une pierre qui roule(n’amasse pas mousse !)
Les élèves sont surpris par des formats monumentaux qui inscrivent par le geste et l’outil une durée qui paraît démentielle.
Ils s’interrogent face à une installation avec webcam et écran de télé, qui fonctionne sur la mise en abîme : je me regarde en train de regarder un support transparent couvert des boucles d’Olivier Michel sur lequel s’inscrit en réserve : circulez, il n’y a rien à voir
Olivier Michel les bouscule un peu : »Qui copie qui ? Vous aviez copié mon geste ! Moi, j’ai copié le travail de Bryan ! Qui a fait l’œuvre ? C’est moi, c’est Bryan ? Où est l’œuvre ? Dans l’objet ? Dans l’idée ?
Tout un champ d’investigations nouvelles s’ouvre à nous :
l’artiste propose aux élèves, au fil du discours, une référence : Raymond Queneau, exercices de style. De retour au collège certains l’emprunte au CDI.
la question du copier/créer émerge (dans sa différence avec le copier/coller), celle du statut de l’œuvre dans l’art contemporain, mais aussi celle du temps dans sa relation à l’œuvre.
Gaétane Levert Professeur d’arts plastiques eroa du collège François Mitterrand de Thérouanne